Portrait

Siham El Faydi, figure engagée du cinéma marocain

Alors que les projecteurs sont braqués sur le Festival de Cannes, ouvert le 13 mai, retour sur le parcours de Siham El Faydi, une figure engagée et dynamique du 7e art marocain.

La culture et la créativité comme levier de développement du Maroc sont placées au plus haut niveau des objectifs de développement du pays, le rapport du nouveau Modèle de Développement leur consacrant un axe stratégique à part entière, avec quatre orientations majeures permettant l’accroissement de la demande, l’activation, l’animation et la professionnalisation des lieux culturels, la préservation et la réinvention du patrimoine, et enfin l’investissement dans les arts visuels, le cinéma et les arts numériques pour le développement de contenus de qualité et d’un soft power renouvelé par l’imaginaire et la création. Ce document de l’équipe Benmoussa appelle à doter les jeunes des compétences pour demain, à leur offrir des opportunités qui améliorent leurs perspectives d’avenir et à leur garantir des espaces d’expression, de participation citoyenne et de prise d’initiative.

Lire aussi | Marjane Group et Pathé s’allient pour développer un réseau de cinémas au Maroc

Dans ce sens, depuis quelques années, une figure se démarque dans le secteur du cinéma marocain, et ce malgré les défis qui pèsent sur ce dernier. Siham El Faydi, productrice, distributrice et entrepreneure culturelle, s’impose aujourd’hui comme l’une des figures montantes de l’industrie cinématographique marocaine. Issue d’une famille d’enseignants et diplômée en économie et gestion culturelle, Siham El Faydi choisit le chemin de la culture où elle décide de construire sa légitimité dans un univers encore dominé par les figures masculines historiques. Dans son style, elle incarne une génération de femmes de terrain, qui pensent avec conviction le cinéma comme un espace d’expression mais aussi comme un levier économique. Pour la petite histoire, c’est à ses 20 ans que cette aventure avec le 7e art débute avec la marque Mégarama. Ce premier job décroché dans le secteur lui permet de construire ses cordes dans le secteur. Dans l’optique de mieux comprendre le monde de l’image et de la communication, elle pousse les portes de l’Institut supérieur de l’information et de la communication (ISIC) à Rabat.

L’heure de l’action

Comme une suite logique, son amour pour l’expression la dirige d’abord sur le projet Concept MENA Group, une société de communication dont l’objectif est d’accompagner des projets cinématographiques, de la conception à la distribution en passant par la production. Au travers d’une approche unique qui allie expertise locale et vision internationale, elle transforme chaque défi en opportunité pour redéfinir l’industrie créative marocaine. Avec résilience, le fruit de ses efforts finit par payer. Elle se fait un nom et tisse des liens solides avec les cinéastes du royaume et les grands noms du monde du cinéma marocain, comme Noureddine Sail. Elle accompagne de grands événements tels que le Festival international du film de Marrakech (FIFM), où elle est notamment mobilisée pour faire le lien avec les marchés du Moyen-Orient et de l’Afrique.

Lire aussi | Les « maisons Netflix » vont-elles enterrer les salles de cinéma ?

Sur le terrain, l’amazone du cinéma se démarque également au travers de plusieurs initiatives. Avec des initiatives comme « L’Village » (web-réalité sur l’entrepreneuriat rural), « Art’s Factory » (plateforme de formation pour jeunes talents) et le Festival gastronomique de Casablanca, Siham El Faydi illustre sa vision holistique de la culture. Selon elle, « le développement des industries créatives nécessite un écosystème complet : formation, production, diffusion et financement ». Pour rappel, Siham figure parmi les jeunes leaders de la région MENA désignés par le Département d’État américain. Elle a bénéficié du mentorat de Jessica Grounds (l’une des 50 femmes les plus influentes aux États-Unis) via le Professional Fellows Program. Une distinction qui témoigne de son impact au-delà des frontières marocaines.

Au service du développement du secteur

Sur le continent, le Maroc demeure le chef de file, faisant un bond de 19 places pour atteindre le 45e rang du classement mondial. Passant de 8 films en 2021 à 25 en 2022, le pays peut cependant, de manière fulgurante, se positionner dans le cénacle des grands acteurs. Surtout à l’heure où, depuis maintenant quelques décennies, sous la conduite éclairée du Souverain, le pays se positionne comme une nation avec qui il faut compter dans bon nombre d’industries stratégiques.

Lire aussi | Avec Gladiator 2, les cinémas marocains se refont une santé

Aujourd’hui, même s’il est bien en vue sur le continent, le cinéma national n’arrive pas encore à se hisser sur le toit du monde. Pour les acteurs, des défis entravent cette ambition. Abordant l’épineuse question du manque de distributeurs, qui s’avère être le talon d’Achille du secteur, Siham El Faydi, CEO de Concept Prod, déclare : « Aujourd’hui, au Maroc, le problème de la distribution est une véritable équation insoluble. » Et de préciser : « C’est ce maillon qui permet d’exporter les films à l’international. »
Selon l’experte, le cinéma marocain a besoin d’une véritable feuille de route de développement à l’aune des défis, et surtout de ce que ce secteur pourrait apporter dans le positionnement du Maroc sur la carte du monde.

Le cinéma marocain en chiffres en 2022

Selon le dernier bilan du CCM, les recettes guichet s’élèvent à 77,3 millions de dirhams (DH) [plus de 7,1 M€], soit une baisse de 16 % par rapport à 2019. Ainsi, le prix moyen du ticket s’élève en 2022 à 52 DH (4,8 €), soit 1,3 % du salaire moyen marocain (autour de 4 080 DH), en hausse par rapport aux années précédentes. Les 6 cinémas marocains de Megarama, répartis dans 5 villes et hébergeant 48 écrans (soit 69 % des écrans en activité dans le pays), ont affiché 84 % de parts de marché, soit 65 millions de DH de recettes, sachant que plus du tiers des entrées du pays (37 %) ont été réalisées au Megarama de Casablanca. Les deux établissements de CinéAtlas, dont l’un a ouvert en octobre 2022 (7 écrans au total), ont représenté environ 5 % des recettes guichet.

 
Article précédent

Investissements verts: Bank of Africa obtient un prêt de 70 millions d’euros

Article suivant

Les prévisions du samedi 17 mai