Le Technocentre, épicentre de l’innovation automobile chez Renault Group

Le Technocentre de Guyancourt et le Centre Technique d’Aubevoye, deux sites stratégiques de Renault Group, jouent un rôle décisif dans le développement des véhicules des marques Renault, Dacia, Mobilize et Alpine. L’un conçoit, l’autre teste et ensemble, ils forment le socle de l’innovation industrielle du Groupe. Exceptionnellement ouverts récemment à la presse internationale, ces lieux habituellement confidentiels nous ont dévoilé leur fonctionnement. L’occasion de découvrir, à travers ce premier reportage, le Technocentre, cœur créatif et technique, où naissent les modèles de demain de Renault Group.
C’est un lieu que peu de visiteurs ont la chance d’arpenter, un site à la fois discret et gigantesque, niché à Guyancourt à l’ouest de Paris dans le département des Yvelines. Véritable cerveau industriel du Groupe, le Technocentre de Renault, qui s’étend sur 150 hectares, abrite depuis 1998 l’un des plus grands centres de recherche et développement automobile d’Europe dédié à ce jour aux marques Renault, Dacia, Alpine et Mobilize. En franchissant les portes de cette plateforme, nous avons découvert une véritable cité de l’innovation, une sorte d’écosystème où près de 12 000 collaborateurs (ingénieurs, designers, ergonomes, spécialistes de la mobilité…) travaillent en synergie pour façonner les véhicules de demain. Il va sans dire que pour nous, journalistes et visiteurs occasionnels d’un jour, impossible de capturer le moindre cliché : ici, toute prise de vue, avec un quelconque smartphone et autre appareil photo, est strictement interdite, confidentialité oblige !
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Au-delà de son envergure, c’est surtout par la diversité et la complémentarité de ses pôles d’expertise (design, ingénierie, simulation immersive, logistique, prototypage…) que le Technocentre impressionne. Car finalement, c’est avec lui (et avec le Centre Technique d’Aubevoye) que Renault Group parvient à transformer une idée en véhicule concret, innovant et industrialisable. Et du premier croquis à la validation technique, de l’expérience utilisateur à la fabrication des premiers prototypes, chaque unité joue un rôle déterminant dans le cycle de développement.
Le design avant tout
Le développement des véhicules débute par le design, piloté par un réseau international de centres créatifs implantés en France, au Brésil, en Corée du Sud, en Inde et en Roumanie. De la phase initiale à l’industrialisation, ces équipes conjuguent savoir-faire et technologies immersives. Mais à l’heure où les outils numériques s’imposent, une question émerge : l’intelligence artificielle (IA) peut-elle remplacer le designer, sans compromettre la dimension humaine et sensible du design automobile ?
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Laurens van den Acker, Directeur du design de Renault Group, l’a rappelé avec force devant l’assistance : «la technologie et l’intelligence artificielle ne remplacent pas l’humain, elles amplifient son pouvoir créatif». Une phrase qui résume parfaitement la philosophie du Groupe face à la montée en puissance de l’IA et des outils immersifs. En effet pour lui, le rôle du designer reste central : c’est l’humain qui donne du sens, qui insuffle une émotion, qui imagine l’usage derrière la forme. Et d’insister sur le fait que l’IA, aussi avancée soit-elle, ne fait que prolonger cette intuition, en accélérant les phases de développement, en facilitant les échanges entre métiers, et en ouvrant de nouveaux champs d’exploration. De quoi pleinement favoriser une collaboration mondiale et en temps réel entre les studios de design de Paris, Bucarest, Chennai, Curitiba et Séoul.
L’indispensable plateforme XR
Au cœur du studio Réalité Virtuelle du Technocentre Renault Group, une plateforme dite XR, de dernière génération, redéfinit les standards de la conception automobile. Pensée comme un outil immersif et collaboratif, elle transforme en profondeur la manière dont les véhicules sont imaginés, testés et validés, bien avant leur existence physique. Ce dispositif innovant repose sur un environnement «phygital», combinant éléments réels et modélisation numérique. Il permet aux équipes de design, d’ingénierie et d’ergonomie de travailler ensemble pour valider, par exemple l’ergonomie d’un habitacle, tester les interfaces, ajuster les ambiances lumineuses et simuler l’expérience utilisateur dans un véhicule qui n’est encore qu’à l’état virtuel. Impressionnant pour le quidam !

Concrètement, la plateforme s’appuie sur un cockpit modulaire automatisé, équipé de capteurs et de technologies immersives. Les utilisateurs peuvent interagir avec le jumeau numérique du véhicule dans un espace virtuel à 360°, tout en percevant des retours physiques partiels (comme les textures, volumes et autres effets tactiles) qui renforcent la précision des évaluations. Une immersion qui permet finalement une collaboration en temps réel entre designers, acousticiens, ergonomes et ingénieurs, dès les premières phases du projet.
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Résultat, la plateforme XR constitue un levier stratégique pour Renault Group. Et pour cause, puisqu’elle accélère les cycles de conception, réduit les coûts liés aux prototypes physiques, améliore la qualité perçue et optimise l’expérience à bord. Et les designers de marteler que cette plateforme incarne pleinement la transformation digitale du design automobile, en plaçant l’humain et l’usage au cœur du processus créatif.
La simulation immersive
L’un des outils les plus impressionnants de ce Technocentre n’est que le Centre de Simulation Immersive, véritable pivot de sa transformation digitale. Sur 2 300 m², ce pôle confidentiel concentre les technologies les plus avancées en matière de simulation numérique et immersive, permettant de concevoir, tester et affiner les véhicules bien avant leur existence physique. Parmi les dispositifs qui nous ont marqués, le volumineux simulateur ROADS (Renault Operational Advanced Driving Simulator) qui s’impose comme une pièce maîtresse. Installé dans un dôme de 7 mètres de diamètre, il offre une expérience de conduite virtuelle d’une précision saisissante : cockpit interchangeable, projection à 360°, accélérations jusqu’à 1 G sur chaque axe, et un temps de réponse inférieur à 30 millisecondes. «Grâce à ce jumeau numérique, les ingénieurs peuvent anticiper et tester virtuellement les conditions de conduite les plus exigeantes, sans attendre la mise en production d’un véhicule réel», nous a confié Olivier Colmard, Directeur de la Transformation Digitale.

Concrètement, ce centre mobilise plus de 70 experts en dynamique véhicule, ergonomie, intelligence artificielle et réalité virtuelle. En regroupant les outils stratégiques (ROADS, HELIOS pour la simulation d’éclairage, et le XR Innov Lab dédié à la réalité virtuelle), Renault Group entend favoriser une collaboration fluide entre les métiers et accélérer les cycles de conception. Sans compter que le concept «phygital», qui mêle maquettes numériques et éléments physiques, permet une validation plus rapide, plus fiable et plus immersive. Il faut dire qu’avec 26 millions d’euros investis, le Centre de Simulation Immersive s’impose comme un levier majeur de performance, réduisant les coûts et les délais tout en renforçant la robustesse des futurs modèles.
Quand le virtuel façonne le réel
A quelques minutes à pied du Centre de Simulation Immersive, un vaste bâtiment abrite le Centre de Réalisation des Prototypes (CRP), une étape clé dans le processus de développement des véhicules de Renault Group. Créé il y a 25 ans, cette véritable usine miniature donne corps aux données numériques issues de la conception, en les transformant en prototypes grandeur nature, fidèles aux futurs modèles de série. Car le CRP permet de valider non seulement les produits, mais aussi les processus industriels et les outillages nécessaires à leur fabrication.
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En reproduisant les lignes de production dans des conditions proches de la réalité, il garantit un haut niveau de qualité dès les premières fabrications. «Nous transformons le virtuel en véhicules, avec une exigence de qualité digne de la production en série», souligne Régis François, Directeur des prototypes et de l’évaluation qualité véhicule. De quoi disposer selon ce dernier d’une réactivité précieuse ; en effet, situé à proximité immédiate des équipes de développement, il permet d’analyser et de corriger rapidement les éventuels écarts. De quoi jouer également un rôle clé dans la montée en cadence d’un site industriel, en formant les opérateurs et, surtout, en validant les outils avant le lancement industriel d’un modèle. Parlons chiffres : en 2024, ce même CRP a produit 770 prototypes, réalisé 80 maquettes, imprimé 12 000 pièces 3D et formé 500 personnes. Si celui du Technocentre est le plus important, Renault Group dispose également de centres similaires en Corée du Sud, en Roumanie et en Amérique latine.

Une logistique intelligente
Notre immersion s’est achevée par la découverte d’une logistique d’un tout autre genre : digitalisée, pilotée en temps réel et structurée autour de trois «Control Towers» complémentaires, véritables vigies stratégiques au service de la performance industrielle et environnementale de Renault Group. Une salle dédiée permet de suivre en temps réel les flux d’approvisionnement, du fournisseur au client final, une visibilité globale qui permet d’anticiper les aléas et de sécuriser les livraisons. «Nos Control Towers nous permettent d’être hyper réactifs face aux crises, voire parfois de les anticiper», souligne Sébastien Liorzou, Directeur process et digital supply chain. Comment fonctionne cette supply chain ?
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Concrètement, la tour baptisée «Business Continuity Plan» est chargée d’identifier et de gérer les risques majeurs tels que les accidents, les grèves ou les cyberattaques. Les tours «Inbound» et «Outbound» assurent respectivement, la réception des pièces et la livraison des véhicules dans les délais. Avec 25 usines supervisées et des milliers d’expéditions quotidiennes, Renault Group déploie une logistique agile et durable. Première du genre en Europe, cette infrastructure incarne une supply chain digitalisée, centrée sur le client et stratégique pour la performance du Groupe.

Au sortir de cette immersion dans le Technocentre, une évidence s’est imposée à nous : Renault Group ne se contente pas d’innover, il est parvenu à réinventer sa manière de concevoir l’automobile. Car manifestement, cette plateforme incarne une sorte de synergie réussie entre design, ingénierie, logistique et production, portée par une intelligence collective et des outils technologiques de pointe.