Fiscalité

Taxation des youtubeurs : une découverte fiscale ?

Les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) ont été et sont toujours à l’origine des transformations d’activités économiques, voire du mode de vie, avec l’émergence de nouveaux métiers, sources de revenus. Et avec l’intelligence artificielle, il faudra s’attendre à une accélération de ce processus dans presque tous les domaines, y compris les métiers hautement qualifiés. Dans ce contexte, la fiscalité risque-t-elle d’être en déphasage ?

Youtubeurs, influenceurs, instagrammeurs, tiktokeurs et autres créateurs et détenteurs de chaines sur le net, étaient loin du radar du fisc, sans pour autant être en dehors du champ d’application de l’impôt, en particulier l’impôt sur le revenu (IR). C’est qu’il s’agit d’activités génératrices de revenus de plus en plus juteux, pouvant dépasser les 100.000 DH par mois ! C’est plus que la retraite dorée d’un Benkirane qui a honorablement rendu service à l’Etat pendant quelques années.

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La base légale de la régularisation fiscale de cette catégorie nouvelle de contribuables, en tant que personnes physiques, existe bel et bien dans le Code général des impôts (CGI). Il s’agit de l’article 30 dédié à la définition des revenus professionnels et où le 2ème alinéa intègre explicitement lesdits revenus générés par les nouvelles activités virtuelles. Cet alinéa mérite d’être rappelé : «Sont considérés comme revenus professionnels pour l’application de l’impôt sur le revenu :
(…) Les revenus ayant un caractère répétitif et ne se rattachant pas aux autres catégories de revenus imposables». Et l’IR étant un impôt déclaratif, c’est au contribuable de souscrire obligatoirement sa déclaration et de procéder au versement de l’impôt sur la base du résultat fiscal déclaré, de manière spontanée. A défaut, l’administration fiscale engage des procédures fiscales de relance prévues dans le CGI, et invite le contribuable, «aimablement», à régulariser sa situation. Si ce dernier ne donne pas suite, le fisc dispose de la procédure de taxation d’office (TO), en vertu de l’article 228 du CGI, comme action ultime. Et là, la facture risque d’être très salée, en termes de principal, de majoration et d’amendes à verser.

Ainsi, il s’avère, de toute évidence, qu’il n’y a rien de nouveau sous le beau soleil de l’impôt, expression du pouvoir régalien de l’Etat. Sauf qu’il s’agit d’activités techniquement nouvelles, exercées hors du radar du fisc. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Dans cette situation, une similitude existe avec d’autres activités exercées dans la zone économiquement grise, de manière informelle, voire illicite. Car l’impôt ne fait pas de distinction entre ce qui est permis ou non par la morale ou la loi. Au sens fiscal, le revenu imposable n’a ni couleur ni odeur.

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En principe, et tout au moins théoriquement, l’activité de prostitution, surtout la prostitution de luxe, exercée en réseaux, rémunérée en argent ou en nature, est imposable. C’est aussi le cas de la vente illicite/illégale de cannabis ou de toute autre drogue. C’est même le cas de la mendicité exercée de manière professionnelle et qui rapporte, semble-t-il, bien plus que le salaire d’un cadre moyen de la fonction publique.  C’est dire que le fisc «a du pain sur la planche». Il faudrait juste le doter de moyens et surtout renforcer ses prérogatives légales pour pouvoir agir contre cette impunité fiscale, première source d’affaiblissement du civisme au sens large du terme.

 
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