Dans une tribune sur son blog le sociologue Noam Chomsky appelait à une refonte des maisons de formation (université) de l’homme… Aujourd’hui elles ne sont pas nombreuses les écoles qui offrent une formation à la vie professionnelle. C’est à cette problématique que s’attaque Soufiane Erraji. L’auteur de quatre livres de développement professionnel, offrant des outils efficaces pour faire le saut dans le monde du travail. Décryptage.
Dans une tribune devenue célèbre, le linguiste et sociologue américain Noam Chomsky appelait à une refonte des universités, estimant qu’elles avaient cessé de « former des hommes libres » pour devenir des machines à produire de la main-d’œuvre. Son constat, bien que formulé il y a plus de vingt ans, résonne encore dans nos sociétés contemporaines, où la promesse éducative s’est progressivement réduite à un simple tremplin vers l’emploi. Or, à l’heure où les diplômes se multiplient sans garantir l’insertion, une question essentielle se pose : qui prépare vraiment les jeunes à la vie professionnelle, mais surtout, à la vie tout court ?
C’est à cette question que tente de répondre Soufiane Erraji, à travers une trilogie ambitieuse dédiée à la formation humaine et à la transition vers le monde du travail. Son œuvre, bien plus qu’un simple guide pour jeunes diplômés, ouvre indirectement une lucarne de réflexion sur le système éducatif marocain et mondial, et dressenun plaidoyer pour une pédagogie réconciliée avec la réalité. « A date, j’ai publié 4 livres, tous autour du développement et de l’excellence professionnels. Ces livres ont été lus dans plus de 60 pays et les retours des lecteurs me confirment que leur contenu est applicable dans un large éventail d’organisations. Pour ce qui est de la forme, ils sont tous écrits sous forme d’histoire, un parcours initiatique où les personnages apprennent qu’il est possible de transformer positivement leur quotidien professionnel, et découvrent des méthodes qui ont fait leurs preuves pour délivrer des résultats exceptionnels, impacter un grand nombre de personnes autour d’eux et laisser une trace qui dure. D’abord, il y a ma trilogie “Transformation Radicale” qui permet aux dirigeants d’entreprise, aux managers et aux employés d’atteindre l’excellence dans leur rôle :
– « Une Organisation Hautement Performante » pose les bases, avec un nouveau PDG qui transforme une entreprise toxique et mal gérée en un environnement où il fait bon travailler.
– « Le Manager EPIC » se déroule dans cet environnement sain et montre aux managers comment développer leurs équipes grâce au modèle EPIC en 4 phases.
– « Je Peux Changer Le Monde » emmène une personne prometteuse dans un parcours en 3 étapes pour réaliser son plein potentiel, avec le soutien de son manager.
Vient ensuite « Partenariats de Haut Vol », premier volet d’une nouvelle série, qui se concentrera sur les compétences essentielles à la réussite des professionnels :
– « Partenariats de Haut Vol » enseigne une méthode puissante pour rallier les clients les plus exigeants et nouer des partenariats à fort impact même, voire surtout, avec ses clients internes au sein de l’entreprise, pour atteindre des résultats exceptionnels » ; nous confie l’auteur.
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Quand l’université oublie la vie
Depuis plusieurs années, les rapports sur l’enseignement supérieur dressent le même constat : les universités produisent des diplômés, mais pas nécessairement des professionnels. Selon le HCP, près de 30 % des jeunes diplômés marocains sont au chômage, un chiffre qui grimpe à plus de 45 % pour les titulaires de licences. En parallèle, les entreprises peinent à recruter des profils opérationnels. Le fossé est là, béant, entre les savoirs théoriques et les compétences pratiques.
Pour Erraji, l’urgence est de remettre l’adaptabilité et la conscience sociale au cœur de la formation. Car la vie professionnelle n’est pas une suite de tâches à exécuter, mais un espace d’expérimentation, d’erreurs et d’apprentissages constants. La trilogie de Soufiane Erraji s’inscrit dans cette volonté de combler le vide entre la théorie académique et la réalité du marché. Elle propose une démarche progressive : apprendre à se connaître, comprendre les codes du monde du travail, et enfin, se projeter dans une carrière cohérente avec ses valeurs. Chaque tome s’apparente à un manuel de survie intellectuelle, nourri d’exemples vécus, d’analyses comportementales et de mises en situation concrètes. L’auteur ne s’adresse pas seulement aux étudiants, mais aussi aux enseignants et recruteurs, qu’il invite à repenser leur rôle. Dans un passage particulièrement fort, il écrit : « Former, ce n’est pas remplir un esprit, c’est éveiller une conscience. » À travers cette formule, il résume l’enjeu central de son œuvre : replacer l’humain au centre du processus éducatif.
Erraji aborde également la question du rapport au travail dans un monde en mutation. L’ère de l’intelligence artificielle, de la précarité des emplois et de la mobilité constante impose une nouvelle forme de savoir-être. Ses écrits appellent à cultiver la curiosité, la polyvalence et la capacité d’apprendre à apprendre — des compétences que les diplômes, à eux seuls, ne garantissent pas.
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Entre désillusion et renaissance éducative
L’intérêt du travail de Soufiane Erraji réside dans sa lucidité. Il ne tombe ni dans la nostalgie des « belles lettres » ni dans l’utopie d’une école parfaite. Son approche est pragmatique : réparer le lien entre éducation, société et travail, à travers une pédagogie vivante. Une idée rejoint ici celle de Chomsky : l’éducation doit servir l’émancipation, non l’aliénation. Elle doit apprendre à l’individu à penser sa place dans le monde, pas seulement à occuper un poste.
Les initiatives privées ou hybrides commencent d’ailleurs à s’en inspirer. Certaines écoles de commerce ou centres de formation au Maroc introduisent désormais des modules de développement personnel, de leadership éthique ou de pensée critique.
Erraji invite à rompre avec le culte du diplôme et à valoriser davantage la compétence, la créativité et la capacité d’adaptation. Une idée qui trouve un écho particulier dans un pays comme le Maroc, où l’économie se transforme à vive allure, portée par l’entrepreneuriat, les métiers du numérique et les nouvelles industries vertes. « Il me semble important que chacun d’entre nous partage ses apprentissages avec les autres, notamment avec les jeunes qui démarrent leur carrière, pour qu’ils leur servent d’accélérateurs et leur permettent d’éviter les pièges auxquels nous avons dû faire face. Par ailleurs, les méthodes que je propose dans chacun de mes livres découlent de mes propres expériences sur le terrain ; je connais donc les problématiques rencontrées, la pression et le stress qui en découlent et j’admets que parfois l’on peut avoir impression qu’il n’y a pas d’issue face aux problèmes du quotidien. Ceci influence bien évidemment ma manière d’écrire. Et les retours des lecteurs me montrent que cela se ressent, qu’ils se sentent compris et accrochent plus facilement avec les histoires des livres. » Et d’ajouter : « Je voudrais surtout donner une lueur d’espoir qu’il est possible de changer les choses, et que chacun d’entre nous a la possibilité d’améliorer son quotidien professionnel, qu’il soit simple employé, responsable d’équipe, ou dans un poste exécutif. Chacun de mes livres s’adresse à un niveau spécifique de l’entreprise, et propose une méthode simple et puissante, pour impacter positivement son expérience professionnelle ainsi que celles des personnes autour de soi. Pour avoir appliqué ces transformations de multiples fois et avoir guidé un grand nombre de personnes à faire de même, je peux témoigner que ces méthodes sont efficaces et tracent la voie de la distinction professionnelle au bénéfice de tous. »
Réinventer l’université : un impératif moral et économique
La réflexion de Soufiane Erraji dépasse le cadre individuel : elle interroge la société dans son ensemble. Dans un monde globalisé, la compétitivité d’un pays dépend aussi de sa capacité à former des citoyens responsables, pas seulement des employés performants. Chomsky l’avait pressenti : « L’éducation n’est pas un acte de consommation, mais un acte de création. » Dans cet esprit, la trilogie d’Erraji apparaît comme une contribution nécessaire à un débat souvent évité : celui de la refondation intellectuelle. Car préparer à la vie professionnelle, c’est aussi préparer à l’incertitude, à la complexité et à la responsabilité. Au fond, Soufiane Erraji nous rappelle que la réussite ne se mesure pas uniquement en carrière, mais en conscience. Et si le rôle de l’école redevenait celui d’apprendre à l’homme à être, avant de lui apprendre à faire ?