Bien-être

Bien-être. Artistes, sportifs, ministres… tous font les mains et les pieds…

L’accès massif, et de plus en plus assumé, des hommes de tous horizons aux centres de beauté, notamment pour la podologie (soins des pieds), a fait exploser les compteurs d’un marché en pleine expansion, longtemps resté discret. Néanmoins, le secteur n’a pas échappé aux radars des établissements de recensement et des statistiques. En 2024, il a généré quelque 11 milliards de dirhams de chiffre d’affaires. Contrairement aux métiers de bouche, où le taux de rotation est élevé, les centres de soins du corps se distinguent par une exceptionnelle longévité économique. 

Au Maroc, comme ailleurs dans le monde, les hommes sont de plus en plus attentifs à leur apparence physique, longtemps perçue comme l’apanage des femmes ou des milieux privilégiés. Cet engouement croissant pour les soins esthétiques – de la tête aux pieds : pédicures, manucures, soins du visage, massages relaxants – stimule de manière spectaculaire le marché de l’esthétique corporelle, porté par une révolution silencieuse mais profonde des mentalités. Dans ce sillage, on observe un glissement subtil mais déterminant : les soins des pieds, longtemps négligés par une certaine pudeur, sont désormais reconnus comme un levier essentiel de prévention contre des pathologies susceptibles d’avoir un impact sérieux sur l’ensemble du corps.

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«Le soin de soi est aujourd’hui bien plus qu’un acte esthétique : c’est un geste social, voire politique. Une nécessité, parfois une urgence. Et c’est précisément là que se situe la mission première de SeñorPie, une franchise mexicaine qui englobe aussi les fonctions du bien-être, du confort et de l’esthétique corporelle », affirme sans détour Ines Lmimouni, brand manager.

Il faut souligner que cette prise de conscience – à savoir que le soin du corps ne relève plus uniquement des spas ou centres de beauté – est le principal moteur de la croissance fulgurante de ces métiers. Aujourd’hui, ce que l’on appelle communément le «business du paraître» pèse plus de 11 milliards de dirhams par an, selon les dernières estimations. Dans ce marché florissant, les soins des mains et des pieds représentent à eux seuls près de 1,5 milliard de dirhams, avec une clientèle masculine de plus en plus présente, atteignant jusqu’à 50 % dans certains établissements haut de gamme des grandes villes.

À Casablanca, dans les quartiers huppés de Racine et Californie, des instituts spécialisés principalement dans la podologie, comme SeñorPie, évoluent aux côtés des centres de beauté tels que Bold Beauty Lounge, LeM Spa Casablanca, Zaha Beauty et Wellness, etc. Leur particularité? Proposer une offre hybride, à mi-chemin entre bien-être et santé préventive, destinée à une clientèle variée… et parfois très influente. Parmi les habitués, on compte désormais des ministres, des parlementaires, des hauts fonctionnaires, des artistes connus, des hommes d’affaires et même des sportifs de renom, tous venus soigner leurs orteils et leurs ongles, loin des projecteurs, mais avec régularité. 

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«Le soin des pieds et des mains est encore vu comme un luxe, mais en réalité, c’est une question d’hygiène, de confort et parfois de santé. Nos clients viennent pour des soins relaxants, médicaux ou correctifs. Beaucoup souffrent de troubles circulatoires ou de pathologies du pied, et n’ont tout simplement jamais osé consulter», explique Ines Lmimouni, brand manager de Señorpie, podologue.

A une clientèle avertie et exigeante, les prestations proposées – pédicure médicale, manucure clinique, soins anti-cors, ongles incarnés ou simple détente – sont assurées par des infirmières pédicuristes diplômées, formées durant 360 heures à la podologie, et opérant dans des cabines individuelles. Le matériel utilisé est stérilisé ou à usage unique, et chaque centre collabore avec un réseau de médecins partenaires (diabétologues, dermatologues, podologues).

Cette approche inclusive s’adresse aussi bien aux personnes âgées, femmes enceintes, personnes à mobilité réduite, qu’aux cadres pressés, habitués à jongler entre responsabilités publiques et exigences d’apparence.

En quelques années, la pratique s’est totalement transformée : autrefois confidentielle, elle devient aujourd’hui un marqueur d’évolution sociale, surtout dans un contexte où l’image, la santé et la performance sont de plus en plus liées. Les 200 à 300 millions de dirhams de chiffre d’affaires générés annuellement par les soins esthétiques masculins illustrent à eux seuls ce basculement.

Prendre soin de ses pieds, surtout lorsqu’il s’agit de pathologies, n’est plus un caprice de star, c’est devenu un acte de respect envers soi-même, une routine de santé globale et, pour certains, un geste politique : être impeccable jusqu’au bout des ongles, même quand c’est concilié sous les chaussettes ou enterrés dans le sable, lors d’une virée à la plage !

3 questions à Ines Lmimouni // Brand manager Señorpie

Challenge : Comment vos clients réagissent-ils à la communication autour du soin «sans jugement»? Est-ce un frein culturel que vous devez déconstruire ?
Ines Lmimouni : C’est un point central dans notre travail. Beaucoup de nos clients nous disent qu’ils ont longtemps hésité à consulter, par peur du regard ou de la gêne. Le fait que nous accueillions chaque personne avec bienveillance, quel que soit son âge ou son état de santé, crée un vrai soulagement. Dans notre culture, il existe encore des freins à l’exposition du corps, et encore plus quand on pense ne pas « correspondre aux standards ». Nous devons encore déconstruire certains tabous, mais les retours positifs nous encouragent à continuer sur cette voie.

Challenge : Pensez-vous que la culture du paraître freine encore certains publics à consulter pour ce type de soins ?
I.L. : Oui, dans certains cas. On peut se sentir gêné de montrer ses pieds ou ses mains s’ils ne correspondent pas à certains standards. Cela peut freiner la prise de rendez-vous. Mais notre mission, justement, c’est de rappeler que le soin est un acte de respect de soi, pas un concours d’apparence. Nous avons voulu casser cette image en proposant des tarifs justes, accessibles à un large public, c’est valable à 20 ans comme à 80 ans.

Challenge : La société marocaine évolue-t-elle vers une plus grande acceptation du soin comme acte de prévention et non plus comme luxe ?
I.L. : Oui, il y a une prise de conscience croissante. Il y a encore des freins, mais ils tombent peu à peu. Certains publics pensent que ce type de soin n’est pas pour eux, alors qu’ils sont souvent ceux qui en ont le plus besoin. Nos soins sont pensés pour tous — hommes, femmes, jeunes, moins jeunes, personnes avec pathologies ou pas — et ça, nos clients le ressentent. Le soin n’est plus vu uniquement comme un caprice, mais comme un geste de santé, de respect de soi, voire d’hygiène de vie. Cette évolution est très encourageante, car elle montre que les mentalités changent, notamment chez les jeunes générations et les médecins et professionnels de santé eux-mêmes, qui n’hésitent plus à orienter leurs patients vers nous.

 
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