Economie

Offshoring au Maroc : la loi française qui inquiète les centres d’appels

Mis à l’épreuve par l’IA, le secteur de l’outsourcing au Maroc risque de subir les impacts de la loi du démarchage téléphonique qui doit entrer en vigueur en France en 2026.

Le secteur marocain de l’outsourcing, déjà confronté à la montée en puissance de l’intelligence artificielle, se retrouve face à une nouvelle menace réglementaire. En France, une loi sur le démarchage téléphonique, qui entrera en vigueur en août 2026, pourrait bouleverser un modèle dont 80 % de l’activité dépend du marché francophone. Dans les détails, le texte interdit tout démarchage sans consentement explicite du consommateur, défini comme «libre, spécifique, éclairé, univoque et révocable». Les sanctions prévues sont lourdes : jusqu’à 75 000 euros pour une personne physique et 375 000 euros pour une entreprise. Pour les centres d’appels marocains, dont une large part de l’activité repose encore sur la télévente, le risque est majeur.

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Certaines grandes structures se veulent rassurantes. Le CEO d’Intelcia consulté dans l’un de nos papiers sur le sujet estimait  que l’impact restera «marginal» pour son groupe, qui s’est déjà diversifié vers des activités à plus forte valeur ajoutée. Mais il reconnaît que cette loi «responsabilisera» davantage les opérateurs en les contraignant à abandonner certaines pratiques comme les relances abusives. En revanche, les petits centres d’appels, très dépendants des volumes de prospection, risquent de voir leur modèle économique fragilisé.

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Au Maroc, le secteur emploie plus de 90 000 personnes et génère 18 milliards de dirhams de chiffre d’affaires. Sa croissance, amorcée dès le Plan Émergence de 2007, avait permis l’implantation de grands groupes internationaux, séduits par les avantages compétitifs du Royaume. Aujourd’hui, plus de 100 000 professionnels travaillent dans l’offshore, un pilier de l’économie marocaine de services. Mais la donne change rapidement. Outre la réglementation française, l’automatisation menace directement l’emploi. Un rapport produit par Caribou Digital et Genesis Analytics estime que 40 % des tâches du BPO en Afrique pourraient être remplacées par l’IA dans les prochaines années. Une double pression réglementaire et technologique qui contraint les acteurs à se réinventer.

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Pour autant, l’optimisme l’emporte. Youssef Chraibi, président d’Outsourcia, rappelle que le secteur croît de 8 % par an à l’échelle mondiale et que le Maroc en bénéficie directement. «Ni l’IA ni les changements de réglementation n’ont affaibli cette dynamique, même en période de crise en Europe», insiste-t-il. Entre adaptation réglementaire et innovation technologique, le pays doit désormais trouver l’équilibre pour préserver un secteur stratégique et fortement créateur d’emplois.

 
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