Tribune et Débats

Marchés actions. L’uniformisation des nomenclatures indicielles dans un contexte incertain

La Bourse de Casablanca a annoncé lors d’une conférence organisée le 24 janvier l’uniformisation de la nomenclature des indices MASI ; toutes les familles d’indice porteront désormais le préfixe « masi». Par conséquent, l’indice de référence et moteur de l’économie marocaine « MASI » devient « masi », le « Morocco Stock index 20 », un des principaux indices boursiers de la Bourse de Casablanca et composé des 20 valeurs les plus liquides cotées sur la place devient à présent le « masi.20 ».

Le « Casablanca ESG 10 » regroupant les entreprises ayant un fort impact environnemental, social et de gouvernance, s’appelle désormais « masi.esg ». L’indice, initialement créé en 2018, contient des entreprises dont les scores ESG dépassent 56 points sur 100, alors même que les scores d’une large partie des entreprises nationales avoisinent les 30 points sur 100.  Le désormais « masi.esg » a été élargi et compte à présent 15 composants, avec l’adjonction notamment de :

-Salafin

-Marsa Maroc

-Cosumar

-Taqa Morocco

-TotalEnergies Marketing Maroc

L’élargissement de l’indice est une bonne nouvelle pour les investisseurs car il permettra d’une part aux gérants de détenir des portefeuilles encore plus diversifiés et, d’autre part, d’être conformes aux dispositions prudentielles de l’AMMC. Cet élargissement s’explique par l’importance croissante octroyée par l’écosystème marocain aux sujets sociaux et environnementaux. Les scores ESG des composants n’ont pas cessé de progresser depuis la création de l’indice. A noter en outre que le « masi.esg » est porté par trois entreprises qui pèsent, à elles-seules, la moitié de l’indice :

-Bank of Africa

-Maroc Telecom

-Attijariwafa bank

La famille indicielle de la place de Casablanca s’agrandit avec l’arrivée du « masi.mid small cap » dont l’introduction permet de mesurer les performances des petites et moyennes entreprises. La création de cet indice permettra d’encourager les introductions boursières de PME/PMI et également d’améliorer la liquidité sur ce secteur clé. Le secteur des petites et moyennes entreprises présente à la fois une liquidité moindre que les marchés Equity classiques. C’est un marché plus spéculatif que les marchés actions standards, avec une volatilité plus importante et présente des opportunités d’investissements risqués mais avec plus de potentiel de gains, du fait qu’un des principes fondamentaux de la gestion de portefeuille est la dualité capital-risque. Cet indice attirera par ricochet les investisseurs avec un appétit accru au risque et une aversion moindre.

Lire aussi | Décryptage. Khalid Ait Taleb expose les axes de la grande réforme [Vidéo]

De surcroit, le lancement du « Masi. Mid small cap », qui contiendra 30 composants ayant une capitalisation boursière comprise entre 561 millions de dirhams et 5,6 milliards de dirhams, a pour objectif de renforcer le marché alternatif, en vue de se conformer aux nouvelles règles de la bourse de Casablanca adoptées en 2019. Les indices sectoriels sont eux-aussi homogénéisés en termes de nomenclature. On dénombre plus d’une vingtaine d’indices dont « masi.transport », « masi.chimie », « masi.électricité », « masi.distributeurs », « masi.mines », « masi.assurance ».

Turbulences sur les marchés actions marocains en 2022 et perspectives incertaines pour 2023

L’homogénéisation de la nomenclature des indices «masi. » intervient dans un contexte macro-économique mondial incertain, miné par une conjonction de crises dont la guerre en Ukraine, la fragilisation de l’économie mondiale post pandémie avec un endettement record des économies avancées et des pays émergents et une charge en intérêt plus lourde du fait de la hausse intercontinentale des taux d’intérêt. En outre, le secteur de la tech est essoufflé, avec des chutes records en 2022 des cours boursiers des géants mondiaux du numérique à l’image de Méta ou encore Amazon.  

De plus, l’inflation sévit et le continent africain n’est pas épargné. Elle se situe au Royaume autour de 6,6% en 2022, portée essentiellement par la hausse des hydrocarbures (+42,3% pour les carburants), et par l’augmentation des produits alimentaires (+11%), selon le Haut-commissariat au Plan. Il s’agit de la hausse la plus importante en plus de 30 ans. L’inflation énergétique et alimentaire s’explique en grande partie par la guerre en Ukraine. Bank Al-Maghrib vient de relever son taux directeur à 2,5% à la fin de l’année 2022 et des hausses à venir ne sont pas à exclure. Il s’agit de la deuxième hausse en l’espace de quelques mois : le taux directeur passe de 150 points de base à 200 points de base, le 27 septembre dernier, avant d’être relevé de nouveau lors du dernier conseil annuel de BAM.

Lire aussi | Tanger. Les plans d’aménagement de Mghogha et Souani homologués

Ces mécanismes de hausse des taux ont pour objectif de contrer l’inflation, cependant la valorisation des actifs diminue et cela connote une baisse des marchés actions. Les marchés Equity sont également souvent délaissés au profit de marchés obligataires, structurellement moins risqués et offrant de meilleurs rendements dans un contexte de hausse des taux. Rappelons que l’indice Masi a baissé de plus de 26% en l’espace d’une année.

Charaf Louhmadi est consultant, chroniqueur & auteur d’ouvrages. Charaf Louhmadi est ingénieur financier, auteur de l’ouvrage « Fragments d’histoire des crises financières » et intervenant au sein du pôle Léonard de Vinci, ainsi qu’à IMT Atlantique. Il publie des chroniques économiques et financières pour la presse espagnole et portugaise dans « RankiaPro Europe Magazine».

 
Article précédent

Décryptage. Khalid Ait Taleb expose les axes de la grande réforme [Vidéo]

Article suivant

Khalid Qalam : «Dans le domaine de l’industrie automobile, le Maroc ne part pas de rien»