Immobilier

Marché de la location. Les bailleurs réticents malgré la forte demande

Malgré les risques inhérents au marché de la location qui peuvent freiner les propriétaires, la conjoncture actuelle et l’évolution économique incitent les acheteurs potentiels à différer leurs projets d’acquisition pour se tourner vers la location, en attendant des conditions plus favorables. C’est le constat général des experts du secteur qui ont analysé pour Challenge Magazine, la robustesse du secteur locatif et mis en lumière les mesures préventives à envisager.

Au Maroc, le marché de la location de biens immobiliers rencontre un obstacle majeur : la peur de louer son bien qui comporte plusieurs risques. Cette crainte est largement répandue parmi les propriétaires, et peut être attribuée à plusieurs facteurs.

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Me Naoui Saïd, Avocat au barreau de Casablanca agréé auprès de la Cour de cassation et Docteur en Droit explique à cet effet, « qu’il peut y avoir plusieurs raisons pour lesquelles les gens ont peur de louer leur bien. Certains propriétaires ont pu avoir des expériences négatives avec des locataires précédents, comme des retards de paiement, des dommages au bien, ou des problèmes de voisinage, ce qui peut les rendre méfiants quant à louer à nouveau. Pour ceux qui n’ont jamais loué leur bien auparavant, la perspective de le faire peut-être intimidante. D’autres propriétaires peuvent craindre de ne pas avoir de revenus stables provenant de la location de leur bien, surtout en période d’incertitude économique. Ainsi, la crainte que les locataires ne prennent pas soin du bien et ne causent des dommages importants peut dissuader certains propriétaires de louer leur bien. Aussi, les propriétaires peuvent craindre de ne pas être en mesure de faire face à des litiges potentiels avec les locataires ». 

Le même constat est fait par Mohammed Lahlou, associé gérant de l’agence Century21 Casa Sud qui explique pour sa part, que « la réticence à louer son bien peut être due à la peur des impayés ». En effet, de nombreux propriétaires ont déjà été confrontés à des locataires qui ne payaient pas leur loyer à temps, voire qui ne le payaient pas du tout. Cette situation peut entraîner des difficultés financières pour le propriétaire, qui se retrouve alors dans l’obligation de trouver un nouveau locataire rapidement afin de pallier cette perte de revenus.

De plus, la peur de louer son bien peut également être liée à la crainte des dégradations. Toujours selon, Mohammed Lahlou « certains locataires peuvent en effet ne pas prendre soin du logement qu’ils louent, et causer des dommages importants. Cette perspective dissuade de nombreux propriétaires de mettre leur bien en location, de peur de devoir engager des frais importants pour réparer les dégâts causés par les locataires ». 

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En outre, la complexité des procédures légales liées à la location peut également constituer un frein pour les propriétaires. En effet, la législation en vigueur au Maroc en matière de location peut parfois être ambiguë, et prend généralement du temps pour le traitement des dossiers, ce qui rend la gestion des litiges éventuels entre propriétaires et locataires assez compliqués. Cette incertitude juridique peut décourager les propriétaires, de peur de se retrouver dans une situation conflictuelle difficile à résoudre.

Yassine Ahdadou, Agent immobilier de la place nous explique que « les procédures au tribunal sont assez longues quand il s’agit de l’expulsion d’un locataire pour non-paiement ou pour un autre motif. Cette situation fait que le propriétaire se retrouve pour une durée donnée sans bien ni rentrée d’argent». Pour ce dernier, «l’établissement d’un contrat entre le propriétaire et le locataire avec une durée déterminée est obligatoire ». Mohammed Lahlou précise pour sa part, « qu’il est important de choisir le locataire sur des critères objectifs de solvabilité vérifiés, d’établir un contrat complet et déclaré de location et enfin, d’être accompagné par un professionnel de l’immobilier ».

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Toutefois, il est quand même essentiel de souligner que malgré les risques encourus, le marché de la location reste très florissant au Maroc et qu’il existe une forte demande sur ce segment.  Yassine Ahdadou explique que «la demande existante est supérieure à ce qui est disponible sur le marché, ce qui impacte le prix et rend donc le bien difficile à louer ». Mohammed Lahlou explique pour sa part cette forte demande par « le report des décisions d’achat dues au renchérissement du coûts des crédits et de la vie ». 

En conclusion, la peur de louer son bien au Maroc est un obstacle majeur pour le marché de la location immobilière. Pour surmonter cette crainte, il est essentiel de renforcer la confiance entre propriétaires et locataires, de simplifier les procédures légales liées à la location, et d’inciter les propriétaires à investir dans des garanties locatives pour se prémunir contre les impayés et les dégradations. En fin de compte, c’est en améliorant la sécurité et la transparence du marché de la location que l’on pourra encourager les propriétaires à mettre leur bien en location, et ainsi répondre à la demande croissante de logements au Maroc. 

Avis d’expert: Maitre Naoui Saïd, Avocat au barreau de Casablanca agréé auprès de la Cour de cassation et Docteur en Droit

Risque et précaution : ce que dit la loi 
Dans le cadre d’une location immobilière, il existe des risques pour les deux parties : le propriétaire bailleur et le locataire. En effet, les risques auxquels peut être confronté le propriétaire bailleur comprennent, les retards de paiement ou non-paiement du loyer, les dommages au bien causés par le locataire, le non-respect des termes du contrat de location et les litiges juridiques avec le locataire.
Toutefois, le locataire peut également encourir des risques, notamment la mauvaise qualité du logement, le non-respect des obligations du propriétaire telles que les réparations et l’entretien, la demande d’augmentation de loyer, qui peut se produire fréquemment tous les trois ans selon les dispositions de l’article 31 à l’article 38 de la loi 12-67, la demande d’expulsion dans le cas où le propriétaire souhaite reprendre possession de son bien selon les conditions figurées dans l’article 45 de la loi n°12-67 sur les baux locatifs à usage d’habitation ou professionnel, ainsi que les litiges juridiques avec le propriétaire.
Pour protéger les deux parties et régir la relation locative, il existe la loi n°12-67 sur les baux locatifs à usage d’habitation ou professionnel, qui encadre les rapports locatifs pour les logements loués à titre de résidence principale. Ces textes prévoient des dispositions concernant le contrat de location, les droits et obligations du propriétaire bailleur et du locataire, les modalités de paiement du loyer, les réparations locatives, les conditions de résiliation du bail, etc.
Pour se protéger dans le cadre d’une location immobilière, voici quelques mesures à prendre :
tout d’abord il faut établir un contrat de location solide et clair. Le contrat doit être rédigé de manière précise, de préférence par un professionnel, et inclure toutes les clauses importantes telles que la durée du bail, le montant du loyer, les modalités de paiement, les conditions de résiliation, les réparations locatives, …
Il est également essentiel d’effectuer un état des lieux détaillé, conformément aux dispositions de l’article 7 de la loi 12-67. Avant l’entrée du locataire dans le bien, il est recommandé de faire réaliser cet état des lieux par un huissier de justice assermenté, afin de noter l’état du logement et de ses équipements. Cette démarche permettra de déterminer d’éventuels dommages lors du départ du locataire.
Le propriétaire peut demander des garanties au locataire, telles qu’un dépôt de garantie (qui ne doit pas dépasser le loyer de deux mois selon les dispositions de l’article 20 de la loi 12-67), une garantie bancaire, ou une assurance loyers impayés, pour se protéger contre les risques financiers.
Ainsi, le propriétaire doit respecter ses obligations légales, notamment en matière d’entretien du logement, de fourniture des quittances de loyer, de respecter des délais de préavis en cas de résiliation du bail, etc.

 
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