Propriété industrielle

Validation des brevets : plusieurs zones d’ombres subsistent encore

Huit ans déjà, que le Maroc a conclu avec l’Organisation européenne des brevets (OEB), un accord de validation des brevets européens au Maroc et pourtant, plusieurs zones d’ombres persistent. Des problèmes surmontables selon les experts, à condition de prendre les mesures nécessaires qui s’imposent. Détails.

C’est en grande pompe que le Maroc a validé il y a quelques années de cela, un accord permettant de valider les brevets européens au Royaume. En effet, le Maroc a conclu, le 1er Mars 2015, avec l’Organisation européenne des brevets (OEB) un accord de validation des brevets européens sur le territoire. Concrètement, les demandes de brevets européens et les brevets européens peuvent donc être validés au Maroc. Grace à cette procédure de validation, les brevets européens peuvent jouir d’une protection équivalente au Maroc à celle conférée par un brevet national marocain. Une grande première à l’époque, puisque c’est la première fois qu’un pays non-européen permet la validité des brevets européens sur son territoire.

Issam Benhssine, conseiller agréé en propriété industrielle et fondateur du cabinet IB FOR IP explique à cet effet, que « sur le plan juridique, l’accord de validation des brevets européens au Maroc est valide, dans la mesure où il donne suite à la stratégie nationale en matière d’innovation menée par le gouvernement marocain et que le projet d’amendement de la loi marocaine relative à la propriété industrielle en 2014 a été approuvé par le Parlement marocain. En vertu des dispositions précitées, un brevet européen validé au Maroc produit les mêmes effets et est soumis aux mêmes conditions qu’un brevet d’invention déposé auprès de l’OMPIC». 

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Le législateur marocain a prévu au niveau de la loi marocaine relative à la propriété industrielle, des actions en justice en matière de brevets d’inventions pour protéger l’intérêt général et/ou les intérêts privés. L’action en nullité peut être intentée par toute personne ayant un intérêt si l’invention ne satisfait pas aux critères de la brevetabilité, si l’invention n’est pas suffisamment décrite, si l’objet de l’invention s’étend au-delà de la demande déposée ou encore si les revendications ne définissent pas l’étendue de la protection (article 85). Cette disposition s’applique également aux brevets européens validés au Maroc (article 88.1). Toutefois, huit ans après, plusieurs zones d’ombres continuent d’entacher cette belle initiative et notamment la question de la validité des brevets ainsi « validés » au Maroc, et cela pour des raisons purement formelles qui pourraient être facilement corrigées selon les experts.  

Daoud Salmouni-Zerhouni, Conseiller en propriété industrielle et Avocat au Barreau de Paris, déclare à cet effet que «c’est un vaste sujet. Pour faire simple, disons que la naissance de ce bel instrument n’a pas eu lieu dans les meilleures conditions. Je pense que pris dans l’euphorie de la signature de cet important accord international pour le Maroc, les parties signataires ont été imprudentes ou négligentes. D’ailleurs, je les crois gênées aux entournures alors que, contrairement aux accords de validation signés avec la Tunisie ou la Moldavie, le texte de l’accord signé avec le Maroc n’est pas disponible, tant l’OEB que l’OMPIC refusant de le publier ou de le communiquer. Il y a là, déjà, une méconnaissance de la Constitution du Royaume qui consacre le droit des citoyens d’accéder à l’information». Pour l’Expert, «le principal problème avec cet accord de validation semble tenir au fait que la partie représentant le Maroc n’aurait eu ni le pouvoir, ni l’autorité pour signer un tel accord international. Par ailleurs, sa ratification pose également question ».

Fondation fragile 

«Nous avons donc un système de validation, qui dans son principe est évidemment bienvenu, mais dont la fondation est extrêmement fragile», précise-t-il. Il attire l’attention sur un volet extrêmement important, à savoir celui de la sécurité juridique. En effet, l’Expert nous fait savoir que le contentieux des brevets d’invention est encore assez limité au Maroc, toutefois cette situation changera à l’avenir. Le contentieux des brevets va être amené à se développer dans les prochaines années, et se posera alors inévitablement « la question de la validité au Maroc de ces brevets européens», souligne-t-il.  

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Plus en détail, si une juridiction marocaine déclare de tels brevets nuls, se posera alors nécessairement la question de la responsabilité et de la réparation du préjudice subi par les titulaires de ces brevets annulés, lequel préjudice pourrait se chiffrer en millions de dirhams.

 
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