Economie

Contrôle des prix de transfert. Un guide pour minimiser les contestations

La mise en place d’un guide de contrôle des prix de transfert par la DGI marque une avancée significative dans la régulation fiscale au Maroc. En établissant des règles claires et transparentes, et en favorisant la transparence et la confiance, le fisc vise à assurer une meilleure équité fiscale tout en encourageant les investissements étrangers dans le pays.

Dans un souci de transparence et de renforcement de la confiance avec les entreprises et les investisseurs, la Direction Générale des Impôts (DGI), a élaboré un guide de contrôle des prix de transfert destiné à ses inspecteurs. « Ce guide, d’une grande importance et très attendu, met en lumière l’approche pratique adoptée par l’administration fiscale marocaine en matière de contrôle des prix de transfert. Pour rappel, les prix de transfert constituent une problématique fiscale qui se pose avec acuité tant à l’échelle internationale qu’au niveau national pour les sociétés multinationales », réagit un expert-comptable.

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Ce guide, qui vient d’être rendu public, vise à établir des règles claires et transparentes dans le domaine des prix de transfert, principalement liés aux transactions entre les filiales de multinationales et leur maison-mère ou d’autres sociétés du groupe. L’objectif de ce guide est de limiter le pouvoir discrétionnaire des inspecteurs des impôts en fournissant des éléments irréfutables pour étayer les redressements fiscaux liés aux prix de transfert. Il faut dire que les redressements fiscaux sont souvent contestés par les entreprises, ce qui peut entraîner des litiges et des accords amiables avec le fisc.

Le guide de contrôle des prix de transfert vise ainsi à améliorer la qualité du contrôle fiscal, réduire les litiges et promouvoir des rapports plus équitables et transparents avec les contribuables, en l’occurrence les filiales des multinationales. Il s’agit d’une avancée significative, car par le passé, les divergences et les contestations autour des comparables utilisés par les inspecteurs étaient fréquentes. Selon la DGI, « tout redressement des prix de transfert doit être fondé sur des bases objectives ou du moins, le moins contestables possibles.

C’est une avancée considérable car, par le passé, la question de comparables sur lesquels s’appuyaient les inspecteurs cristallisait beaucoup de divergences et de contestations de la part des entreprises. » Le guide met en place plusieurs mesures pour garantir une procédure de contrôle plus objective et transparente. Avant tout ajustement éventuel, les inspecteurs doivent engager des débats et des échanges avec le contribuable, permettant à l’entreprise de présenter ses explications et les informations nécessaires. De plus, la notification de régularisation des prix de transfert doit démontrer l’existence de liens de dépendance entre les entités impliquées dans les transactions contrôlées.

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Dans le cas où il n’y aurait pas de liens de dépendance, un ajustement des prix de transfert ne peut être effectué que s’il existe des éléments tangibles remettant en question la justification, l’effectivité ou le lien de la transaction avec l’activité normale de l’entreprise. De plus, les inspecteurs doivent démontrer l’existence d’un transfert de bénéfices en fournissant une description détaillée des faits et des circonstances, notamment à travers l’examen de la documentation des prix de transfert, des éléments comptables, des contrats et des conventions.

Des règles claires et transparentes pour favoriser la confiance avec les filiales des multinationales

Il est important de souligner que ce guide de contrôle des prix de transfert ne remplace pas la législation, la réglementation et les circulaires d’application du Code général des impôts. Il s’agit plutôt d’instructions destinées aux inspecteurs pour établir des bases objectives et minimiser les contestations des entreprises. En renforçant le contrôle des prix de transfert, la DGI cherche à déminer le terrain en établissant des règles claires, transparentes et objectives. Cela permettra de favoriser un climat de confiance avec les filiales des multinationales, ce qui est crucial pour attirer les investissements étrangers.

Dépendance directe et indirecte

La dépendance directe entre les entités peut être établie dans différentes relations, notamment entre les sociétés-mères et leurs filiales, les sociétés non-résidentes et leurs établissements au Maroc, ainsi qu’entre les sociétés et leurs succursales. Sur le plan juridique, la filiale est considérée comme dépendante de la maison-mère lorsque celle-ci détient un nombre d’actions significatif dans son capital ou exerce un pouvoir décisionnel direct ou indirect sur la filiale par le biais de personnes interposées telles que des gérants, des administrateurs, des directeurs ou des membres de leur famille. De plus, toute société contrôlée par la société exerçant le contrôle ou toute personne ayant un intérêt dans l’activité ou le capital de la société exerçant le contrôle peut également être considérée comme dépendante.

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Sur le plan économique, la dépendance peut résulter de liens étroits régissant les activités commerciales, tels que l’approvisionnement en matières premières, en pièces détachées, l’utilisation de marques ou de brevets détenus par la maison-mère, etc. Les liens indirects de dépendance se manifestent notamment entre les filiales d’un même groupe d’entreprises qui sont toutes sous le contrôle d’une société mère. Ces liens peuvent être financiers, résultant de participations réciproques ou croisées, ou d’une sous-dépendance. En dehors des situations de dépendance légale, des liens de dépendance de fait peuvent également exister, notamment lorsque des dirigeants de sociétés influencent la gestion et la prise de décision au sein d’autres sociétés par le biais de leurs participations financières. Pour l’administration fiscale, établir cette dépendance est crucial car cela permet de surveiller les éventuels transferts indus de bénéfices vers des juridictions fiscales plus avantageuses.

Les mécanismes de transfert de bénéfices

Il faut dire que les multinationales ont recours à divers moyens pour transférer des bénéfices entre les entités du groupe. Parmi les pratiques couramment utilisées, on peut citer la majoration des prix d’achat, la minoration des prix de vente, la fixation de redevances et autres rémunérations excessives, la prise en charge de frais de gestion fictifs ou excessifs, l’utilisation de taux d’intérêts réduits ou majorés, l’abandon de créances ou renonciation à des recettes, les opérations de compensation, la mise à disposition de personnel, l’assistance technique, le transfert de savoir-faire et même les avances de trésorerie. Tous ces aspects font traditionnellement l’objet d’une surveillance étroite et sont passés au crible lors des vérifications comptables effectuées par l’administration fiscale.

L’accord préalable sur les prix de transfert (APP) : entre sécurité juridique et remise en cause

Pendant la période de l’accord préalable sur les prix de transfert, qui ne peut excéder quatre exercices, les transactions intra-groupe couvertes par cet accord ne peuvent pas être rectifiées en ce qui concerne les bénéfices indirectement transférés. Cela offre aux entreprises une certaine sécurité juridique. Cependant, il convient de noter que l’administration fiscale peut remettre en cause la méthode de détermination des prix de transfert associée à une transaction couverte par l’APP dans deux cas spécifiques. Premièrement, si les faits ont été présentés de manière erronée, des informations ont été dissimulées, ou s’il y a des erreurs ou des omissions imputables à l’entreprise. Deuxièmement, si l’entreprise ne respecte pas la méthode convenue et les obligations de l’accord ou fait usage de manœuvres frauduleuses. Ainsi, bien que l’APP offre une sécurité juridique, il n’immunise pas totalement les entreprises contre une remise en cause ultérieure de la méthode de détermination des prix de transfert.

 
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