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Zones économiques spéciales. Des catalyseurs pour booster la transformation économique en Afrique

Faire de l’Afrique une destination de plus en plus prometteuse notamment en termes d’investissement direct étranger, afin d’y renforcer son développement économique et asseoir sa croissance, tel a été le fil conducteur qu’ont suivi les 300 participants ayant pris part à la 8ème convention annuelle de «l’African Special Economic Zones», organisé par l’association Africa Economic Zones et l’Union africaine (UA), en partenariat avec Tanger Med, l’UNCTAD, l’UNIDO et la Banque africaine de développement (BAD). 

C’est à Tanger, les 23 et 24 novembre dernier, qu’ont eu lieu les travaux de la 8ème édition de l’African Special Economic Zones Annual Meeting. L’événement a accueilli d’éminents experts, des décideurs et les représentants de zones économiques Africaines et d’organisations internationales qui ont eu à cœur de débattre autour de la thématique suivante:  «Promouvoir l’industrialisation durable et la diversification économique : Une feuille de route pour les zones économiques spéciales africaines».

Il faut dire qu’en Afrique, les Zones économiques spéciales (ZES) jouent un rôle très important dans le développement du secteur privé et l’industrialisation dans la sous-région. Ainsi, depuis huit ans, ces opérateurs se sont regroupés au sein de l’Association Africaine des Zones Économiques (AEZO), une plateforme d’échange et de partage au profit de l’écosystème des zones économiques continent. Fondée en novembre 2015 par le Groupe Tanger Med, le premier complexe industrialo-portuaire d’Afrique et de Méditerranée, avec la participation de représentants de plusieurs autres zones économiques africaines, l’AEZO, qui compte à ce jour plus de 85 membres représentant plus de 45 pays africains et regroupe les principales zones économiques africaines et institutions en charge du développement, de la gestion et de la promotion des zones économiques en Afrique. 

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En effet, le sujet du développement des zones économiques intéresse aussi bien les grands que les petits pays africains comme l’Eswatini qui était présent l’année dernière au «Steering Committee». Après les succès des éditions précédentes au Nigeria en Côte d’Ivoire et en Ethiopie, tous ces opérateurs ont répondu présents à nouveau dans la capitale du Détroit. Durant deux jours, les participants ont échangé sur des sujets d’intérêt commun permettant de renforcer l’engagement en faveur du développement économique de l’Afrique. 

Il faut souligner que cette 8ème convention annuelle de l’AEZO se tient dans une conjoncture économique internationale qui n’enthousiasme pas les investisseurs. Certes, les promoteurs en termes d’investissement connaissent des moments assez difficile. Mais le paysage de l’investissement mondial évolue de manière extrêmement rapide. Toujours est-il que l’Afrique est une destination d’investissement, notamment en termes d’investissements directs étrangers, et du coup, les zones économiques spéciales (ZES) en tant que pôles d’attraction d’activités industrielles, d’investissements directs étrangers (IDE), et catalyseurs du commerce intrarégional, peuvent y jouer un rôle clé.

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Lors de son allocution, Mehdi Tazi Riffi, CEO de Tanger Med, a mis l’accent sur le potentiel important de ressources dont regorge le continent africain, qui est doté d’un marché de 1,2 milliard d’habitants, dont 60% ont moins de 25 ans. Le CEO de Tanger Med a également relevé que les économies africaines ont fait preuve de résilience avec une croissance économique qui s’est établie à 3,8% en 2022 et estimée à 4,1% en 2023-2024, soulignant, toutefois, que la part du commerce intra-africain dans les exportations du continent stagne toujours à 15%, contre 67% en Europe. Si l’Afrique abrite environ 17 % de la population mondiale, elle ne représente que 2,5 % du commerce mondial, sans compter que certaines lacunes persistent encore, estime Mehdi Tazi Riffi. «La Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF) représente donc une excellente opportunité pour créer un marché unique et accélérer l’intégration commerciale du continent, si nous parvenons à combler le déficit d’infrastructures et à répondre aux besoins d’industrialisation», a ajouté Mehdi Tazi Riffi, relevant que la capacité des ZES à pérenniser leur développement est intimement liée à leurs objectifs stratégiques et à la qualité de leur modèle opérationnel.

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«Le Maroc, le deuxième plus grand investisseur africain en Afrique, fait preuve d’un fort engagement politique pour le succès de l’intégration régionale africaine», a-t-il poursuivi, notant que cet événement intervient quelques jours seulement après le Discours royal à l’occasion du 48è anniversaire de la Glorieuse Marche verte, dans lequel SM le Roi Mohammed VI a souligné l’importance de renforcer la connectivité de la façade atlantique du pays avec les voisins africains. «Nous continuerons à travailler avec nos partenaires africains pour assurer le développement réussi des ZES sur notre continent», a-t-il insisté.

Aujourd’hui, le challenge ou les défis pour les zones économiques africaines, c’est de pouvoir rejoindre les chaînes de valeurs industrielles, d’accélérer la vitesse de leur développement et de pouvoir répondre d’une façon de plus en plus efficace aux exigences des investisseurs, qui considèrent aujourd’hui l’Afrique comme étant une terre d’opportunités et un marché important. Jusque-là, les zones économiques africaines ont joué un rôle clé dans la promotion de l’industrialisation, de la diversification économique et de la transformation structurelle. Selon l’Association Africaine des Zones Economiques (AEZO), il existe à ce jour 203 ZES opérationnelles en Afrique. Aussi, plus de 73 projets ont été annoncés pour être réalisés dans 47 des 54 pays que compte le continent. Toujours selon les chiffres de l’AEZO, plus de 60 millions d’emplois ont été créés dans les secteurs de l’agroalimentaire, de l’industrie et des services, et plus de 2,6 milliards de dollars ont été investis dans le développement de projets de ZES sur le continent. «Les ZES sont des catalyseurs du développement et de la croissance en Afrique et peuvent jouer un rôle clé dans la diversification économique et l’accélération de l’industrialisation durables », a d’ailleurs précisé dans ce sens Albert Muchanga, Commissaire au commerce et à l’industrie de la Commission de l’Union africaine, dans son allocution. 

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Quant à Richard Bolwij, Directeur de la branche Recherche sur l’investissement au sein de la CNUCED, il a souligné que les crises politiques et économiques qu’a connues le monde au cours des dernières années ont profondément perturbé les flux d’IDE vers l’Afrique, notant la nécessité d’adopter des modèles de financement durables pour renforcer l’essor des ZES africaines et de promouvoir les investissements des PME dans ces zones. Les participants sont unanimes : le développement de l’Afrique passe nécessairement par ces zones économiques. Selon eux, les ZES peuvent remodeler l’avenir du continent africain, en favorisant la création de richesses et d’emplois, l’accélération du rythme de réalisation des infrastructures, l’accroissement de l’attraction des IDE et la promotion de l’intégration régionale. Reste à adopter les mécanismes nécessaires pour promouvoir le rôle de ces zones, notamment en renforçant la connectivité logistique, et en développant des partenariats stratégiques, permettant de mobiliser les ressources financières nécessaires pour assurer leur développement et favoriser leur transformation en zones durables et intégrées.

Ce qu’il faut savoir sur l’AEZO 

L’organisation des zones économiques africaines (AEZO) est une association continentale représentant les principales institutions publiques et privées chargées du développement, de la gestion et de la promotion des zones économiques en Afrique. Elle comprend aujourd’hui 85 zones économiques spéciales réparties dans 45 pays. Fondée en novembre 2015 par Tanger Med Group Maroc, l’AEZO s’efforce de soutenir les projets des zones économiques africaines et de renforcer les relations au sein de son écosystème. S’appuyant sur ses orientations stratégiques, l’AEZO entend partager avec ses membres les bonnes pratiques, leur fournir une assistance stratégique et technique, se connecter avec des entreprises internationales, réseauter et promouvoir des modèles et des pratiques économiques durables. Cette année, en plus du Maroc, du Gabon et du Sénégal, de nouveaux pays ont rejoint le comité de pilotage de l’organisation, notamment le Ghana, le Kenya, la Guinée et l’Eswatini. 

Témoignage
Emmanuel Mbarga,Conseiller régional pour l’Afrique centrale et expert principal pour les questions d’accès au marché au siège de la ZLECAF

Il est important que ce genre de forum et d’activités se tienne sur le continent pour qu’il y ait une transmission des expériences et des bonnes pratiques et pour que tous les acteurs puissent aller vers l’accomplissement de ce marché africain. En février dernier à Gaborone au Botswana, une directive européenne a été adoptée par le Conseil de la ZLECAF. Cette dernière, va permettre aux produits qui sont fabriqués dans la zone de libre-échange continentale africaine et dans les zones économiques spéciales de pouvoir bénéficier de préférences commerciales de la ZLECAF. Une avancée qui va permettre aux zones économiques spéciales africaines de contribuer à l’industrialisation de l’Afrique, de participer au développement du commerce intra-africain et au développement des zones économiques africaines. 

Zones économiques spéciales : vers un modèle africain 
Cette 8ème convention annuelle a été une plateforme assez importante qui a permis à l’AEZO de réunir les membres de sa communauté. Ils ont pu échanger avec l’ensemble de leurs partenaires, sur le bilan de ces dernières années, notamment leur réalisation principale à savoir la mise en place d’un modèle de développement des zones économiques Africaines. Cette rencontre a également permis de dresser, dans un premier temps, le bilan des réalisations et de voir dans quelle mesure ce modèle Africain est aujourd’hui duplicable et applicable par les zones économiques africaines.
Dans un second temps, ils ont pu, grâce à cette édition, présenter à l’ensemble de leur communauté la feuille de route qu’ils comptent adopter pour les prochaines années, tout en mettant en avant le principe de développement durable, plus précisément du développement industriel durable et soutenu.
Ils ont aussi évoqué des sujets importants qui ont été détaillés par la suite par l’ensemble des experts, notamment en matière de digitalisation, de mise en place d’une proposition de valeur compétitive et surtout l’impact du volet logistique. Une logistique performante et compétitive pour le développement des zones économiques. Il faut dire, que tous ces axes majeurs représentent la feuille de route de l’AEZO pour les prochaines années avec comme principal axe de développement, la mise en place de cette feuille et les zones économiques qui sont alignées avec les principes de développement durable telles qu’elles ont été annoncées par les Nations unies.

Tanger Med, un modèle pour les zones économiques africaines 
Beaucoup d’opérateurs dans leurs interventions ont salué Tanger Med comme source d’inspiration. Selon eux, le Groupe Tanger Med se distingue aujourd’hui par rapport à l’ensemble des projets qui ont été réalisés sur le continent africain. Il faut rappeler, que Tanger Med aujourd’hui n’est pas seulement un pôle portuaire et logistique, et un pôle industriel qui se positionne sur le continent africain, mais il se positionne aussi comme un projet intégré  au niveau mondial. Il compte compte 8 zones d’activités dédiées aux secteurs automobile, textile, aéronautique, logistique…, 1200 entreprises installées employant 100.000 personnes et réalisant 133 milliards de DH de volume d’affaires. En effet, le complexe portuaire de Tanger est à ce jour le premier port en Afrique et en Méditerranée, occupant depuis plus de 5 ans cette position et se classant au 22ème rang au niveau mondial. 

Par ailleurs, la zone économique de Tanger Med bénéficie aussi d’une infrastructure logistique de qualité et offre une envergure internationale aux industriels qui sont installés dans ses différentes zones. Un rôle de locomotive pour le continent qui responsabilise Tanger Med par rapport au développement de partenariats renforcés avec ses partenaires africains. De quoi inspirer ces derniers qui peuvent reproduire l’exemple marocain avec quelques adaptations locales. Au-delà, Tanger Med et ses confrères africains sont aussi alignés avec les objectifs de l’implémentation de l’accord de libre-échange continental – ZLECAF-. De quoi leur permettre, de façon directe ou indirecte, de développer des complémentarités avec ces différentes zones africaines et de renforcer le positionnement de l’Afrique de façon globale, mais aussi des zones économiques africaines sur les chaînes de valeurs à l’international. Cela permettra de créer encore plus de liens entre les différentes zones économiques africaines pour réussir l’implémentation de la ZLECAF et accélérer l’industrialisation de façon plus globale sur le continent.

 
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