transition numérique

Maroc digital 2030: Pourquoi le Maroc a un sérieux retard à rattraper

Maroc digital 2030, la nouvelle stratégie numérique vient d’être révélée. Quels en sont les véritables chantiers ? Sont-ils suffisants? Décryptage !

Le Maroc veut faire de la digitalisation un des piliers de son développement et un atout clé dans l’amélioration de la gouvernance. Selon un rapport de la Banque Mondiale, le projet d’une nation digitale réussie peut faire économiser au Maroc environ 718 millions d’heures de travail par an, soit 1% du PIB.

C’est à la lumière de ces opportunités évidentes pour l’économie nationale, que les gouvernements qui se sont succédés ces deux dernières décennies ont lancé plusieurs stratégies, en l’occurrence Maroc Numeric, Maroc Digital , Morocco Tech et plus récemment Maroc Digital 2030. Aujourd’hui, même si les efforts du Maroc sont palpables dans certains secteurs, le pays accuse un certain retard. Faisant partie des 5 axes clés du nouveau modèle de développement du Maroc, le sujet du sujet du digital est une véritable priorité des arcanes de gouvernances. La nouvelle stratégie Digitale 2030, livrée récemment; en témoigne la teneur. 

Lire aussi | Startup nation. L’autre casse-tête du Maroc digital…

Cette nouvelle feuille de route portée par le Ministère de la Transition numérique, au-delà des enjeux socio-économiques, compte booster le potentiel du Maroc dans les secteurs où il affiche un certain retard. Par exemple dans le secteur de l’Egov, le Maroc affiche un certain retard. Retard d’ailleurs, qui a été au cœur d’une des récentes études de l’ausim. « Et malgré les stratégies nationales successives, force est de constater que le niveau de digitalisation au Maroc ne progresse pas au rythme attendu, comme en témoigne son classement dans les nombreux index internationaux, notamment le « UN E GOVERNMENT INDEX 2022 » (qui fait figure de référence internationale) le Maroc a progressivement régressé comparativement aux autres pays dans le monde, passant de la position 30 en 2014, 78 en 2019 à 101 en 2022, sur 193 pays. »

Et de poursuivre : »Il faut noter que le niveau de maturité et la qualité des services digitalisés restent globalement faibles avec seulement 23% d’entre eux (cartographie 2019) considérés comme réellement dématérialisés, le reste (77%) limité à des services informationnels ou ne proposant qu’une dématérialisation partielle, ne permettant pas ainsi de proposer un service de qualité aux citoyens et aux entreprises. »

Stratégie digitale 2030 : les recommandations de l’ausim 

Après avoir dressé un état des lieux de la problématique qui qui fait tache d’huile sur les efforts du Maroc dans le chantier du numérique, l’Ausim émet des recommandations pour l’Administration pouvant accélérer la digitalisation des services publics 

Lire aussi | Agadir inaugure la Digital Maroc School

1. Le Citoyen et les Entreprises au centre. Mettre l’utilisateur au centre des stratégies digitales. En effet, celà pousse à adapter le fonctionnement pour se mettre au diapason des attentes et exigences des citoyens et entreprises, qui sont les consommateurs finaux des services publics. 

2. Mise en place d’un baromètre national annuel permettant de mesurer le niveau de Digitalisation des services publics. Ce système sera en particulier en charge de mesurer de manière annuelle le niveau de digitalisation de l’ensemble des services publics de manière nominative par ministère et par service, de quantifier et publier leur niveau d’usage. 

3. Mise en œuvre d’une véritable feuille de route opérationnelle de digitalisation des services publics et d’un schéma directeur clarifiant son architecture et ses priorités. Le schéma directeur donnera une architecture d’ensemble de digitalisation qui structurera les modalités d’échange de données entre administrations, définira les rôles des principaux modules communs comme ceux de l’identification du paiement en ligne.

4. Mise en œuvre d’une réelle gouvernance forte permettant de superviser la Digitalisation des services publics. Cette gouvernance qui sera en charge de mettre en œuvre la feuille de route et devra avoir la capacité d’arbitrer et décider concernant les sujets de blocage et disposer d’une véritable enveloppe budgétaire directe ou indirecte. 

5. Renforcement majeur du budget public de Digitalisation de l’Administration marocaine en lien avec l’importance. Par rapport à certains pays de référence le benchmark montre que l’Administration au Maroc investit deux fois moins (investissement rapporté au niveau du PIB) par rapport à certains pays dans la digitalisation de ses services publics. Si le Royaume se fixe des ambitions d’une réelle transformation de l’Administration par le digital il semble aujourd’hui nécessaire de doubler les ressources financières allouées à cette transformation. 

6.Renforcement du partenariat Public-Privé et des Écosystèmes. L’Administration Publique ne peut à elle seule assurer toutes les actions nécessaires pour une transformation réussie. La collaboration est la clé ! Qu’il s’agisse de collaboration avec les acteurs du monde académique ou ceux du monde associatif, et bien évidemment ceux du secteur privé. Dans ce contexte, mettre en place le cadre opérationnel pour la mise en pratique des projets de collaborations avec les partenaires publics et privés s’avère nécessaire. Les Partenariats Public Privé (PPP) peuvent apporter des réponses pratiques à certaines contraintes liées aux projets de transformation dans le Secteur Public. Il est, toutefois, nécessaire de clarifier les responsabilités de chaque partie prenante en termes de portage des projets, afin d’assurer la souveraineté des infrastructures, des applications et des données ainsi que la transparence des business models vis à vis des acteurs impliqués.

7. Soutien aux Administrations pour le recours systématique à des Systèmes d’Information et à la dématérialisation de leurs données. La transformation digitale nécessite que les Administrations puissent traiter et échanger des données entre elles. Or, l’existence à date de nombreuses procédures papier, le non recours aux Systèmes d’Information par de nombreuses Administrations rendra leur transformation digitale très difficile. Il nous semble donc qu’une étape majeure consiste pour les différentes Administrations de manière standalone de s’équiper en systèmes d’information permettant de dématérialiser leur procédures et données en interne. 

8. Mise en place d’une politique RH spécifique pour les métiers du Digital, de la Donnée et des Systèmes d’Information. Il est clair qu’il est impossible de réussir la transformation Digitale de l’Administration sans pourvoir attirer un noyau dur de talents en charge d’implémenter cette transformation. Or ces talents sont loin d’être attirés par les opportunités professionnelles aujourd’hui offertes par l’Administration à cause des niveaux de rémunération, des procédures de recrutement, et des opportunités d’évolution. Il apparait aujourd’hui critique de pouvoir offrir une offre RH spécifique (en termes de conditions salariales et d’opportunités de développement) qui sort des circuits classiques pour pouvoir attirer et développer ces talents.

Comment faire une digitale nation sans un écosystème haut débit pertinent ?

Selon l’OCDE (Organisation de la Coopération et du Développement Économiques), ce sont les pays asiatiques qui sont les mieux équipés. En effet, la fibre optique représente dans certains pays asiatiques autour de 80% des connexions internet fixe haut-débit. Sur le continent européen, la Suède et l’Espagne, entre autres, font partie des pays où le déploiement de cette technologie est le plus avancé, avec une part dans le total des connexions haut débit qui dépasse 60 %. Au Maroc même si cette technologie est présente, son spectre demeure assez faible. Seul 336 000 clients ont en bénéficié en 2021, soit un taux de pénétration du haut débit de 3,9%, selon l’ANRT (comparativement Tunisie 7%, Algérie 7,7% et Egypte 5,4%). 

Lire aussi | Digital. Mazadi veut révolutionner le domaine des enchères

Les raisons de ce retard tirent leur substract des problématiques de cadre réglementaire très rigide de la loi Telecom qui n’a pas prévu le chaînon manquant des « opérateurs d’infrastructures Télécoms », nous confie un expert des NTIC sous couvert de l’anonymat. « Ce cadre rigide ne permet pas le partage et la mutualisation de ces infrastructures. Des acteurs publics qui détiennent des réseaux de fibres excédentaires (L’ONCF, L’ONEE et ADM) ne peuvent pas les commercialiser à d’autres opérateurs, très exigeants en connectivité Télécoms, hormis les opérateurs Télécoms (Exemple : L’ONCF dispose d’un réseau de fibre de 2700 kms dont 70% n’est pas utilisé). »

Il faut par ailleurs noter que le déploiement du très haut débit par la fibre optique est assuré par les trois principaux opérateurs via la FTTH dans le cadre des lignes directrices FTTH fixées par l’Agence Nationale de Réglementation des Télécoms (voir la décision ANRT/DG/N°06/14 du 16 avril 2014 sur site ANRT). Aujourd’hui, avec la démocratisation de l’utilisation d’internet dans les habitudes de vie, la FTTH se positionne comme un véritable outil de lutte contre la fracture numérique.

 » Les habitants des zones non rentables pour les opérateurs demandent eux aussi aujourd’hui les services offerts par les grands opérateurs via les réseaux FTTH . Ces habitants veulent se connecter à l’internet afin d’échanger eux aussi des séquences vidéos par exemple. Aussi, la connectivité télécom est-elle un moyen d’attractivité des investissements pour les localités rurales », déclarait Ahmed Khaouja , ex-directeur de la concurrence et des opérateurs à l’ANRT dans une tribune.

 
Article précédent

Le Sandrider, la nouvelle arme de Dacia pour s’imposer en rallye-raid  

Article suivant

Tanger Med. Plus de 8,6 millions de conteneurs traités en 2023, un résultat en avance de 4 ans par rapport aux objectifs